L’anatomie externe
L’exosquelette
Le corps des fourmis est entouré par un squelette externe, l’exosquelette ou tégument. Mince, mais rigide et résistant, l’exosquelette est formé par l’association d’une substance de soutien, la chitine, et d’une protéine, l’arthropodine. Cette dernière assure la rigidité du tégument. Elle subit une sorte de tannage par un processus chimique complexe qui la rend un peu semblable à du cuir. Au niveau des articulations entre les diverses parties du corps, le tégument reste souple, ce qui permet aux insectes de bouger.
Le corps des fourmis, de même que celui des autres arthropodes, est formé par un certain nombre d’éléments appelés segments (ou métamères), disposés à la suite les uns des autres. On dit que ces animaux ont le corps segmenté (ou métamérisé). Ces différents segments constituent les trois parties distinctes du corps : la tête, le thorax et l’abdomen, ou gastre.
La tête et les yeux
La tête des fourmis est composée de six segments fusionnés. Elle porte les yeux composés, les yeux simples (pour certains individus), les mandibules et les antennes. Les yeux composés des fourmis renferment chacun plusieurs milliers d’éléments sensibles à la lumière, les ommatidies, dont la surface forme une facette hexagonale.
Les ommatidies sont groupées sous une lentille (l’équivalent de notre cornée), présentant autant de facettes que d’ommatidies. Les yeux simples, ou ocelles, comportent une lentille unique, qui recouvre des éléments sensibles à la lumière. Les yeux composés sont adaptés à la vision d’objets en mouvement rapide. Leur champ visuel est considérable, ce qui permet aux insectes d’avoir une très bonne vision binoculaire et une bonne appréciation des distances.
Les ocelles ne jouent aucun rôle dans la vision des formes et ne sont sensibles qu’aux variations de l’intensité lumineuse. Elles sont au nombre de trois chez les larves, les mâles et les reines, et sont absentes chez les ouvrières adultes. La présence d’ocelles est donc un élément important permettant de distinguer les individus sexués (reines et mâles) des ouvrières.
Les mandibules
Les fourmis se servent de leurs mandibules pour s’alimenter, mais aussi pour transporter de la nourriture ou déplacer les larves et les nymphes. Chez certaines espèces, les individus « soldats » possèdent des mandibules très puissantes grâce auxquelles ils sont capables d’arracher, broyer ou découper leurs ennemis, ou même de les fixer au sol…
Les antennes
Les antennes sont composées de onze segments. Le premier, le plus long, est appelé scape. Le deuxième est un funicule composé d’anneaux, le pédicelle, qui forme toujours un coude. Les neuf autres, qui constituent la flagelle, sont de plus petite taille. On dit que les antennes des fourmis sont de forme coudée, ou génistée, ou encore genouillée. Ce sont les organes sensoriels les plus importants des fourmis car elles sont recouvertes de sensilles. Les sensilles sont des sortes de poils qui abritent un neurone à leur base, assurant la détection de stimuli.
Les antennes sont donc le siège des sens de l’odorat, du goût et du toucher. Étant coudées et mobiles, elles permettent une riche communication entre fourmis, ainsi qu’entre ouvrières et larves.
Le thorax et les pattes
C’est au niveau du thorax que s’articulent les pattes des fourmis. Chez les individus sexués comme les reines et les mâles, le thorax porte aussi les ailes et les muscles servant à les actionner.
La fourmi possède, comme tous les insectes, trois paires de pattes. Elles sont chacune constituées de cinq pièces appelées segments. Ces segments, articulés entre eux, portent les noms de hanche (ou coxa), trochanter, fémur, tibia et tarse. La hanche assure l’articulation de la patte sur le thorax.
Sur les pattes, les fourmis présentent des petits crochets qui leur servent à faire leur toilette ainsi qu’à étaler les phéromones sur leur cuticule.
Le pétiole et le post-pétiole
L’abdomen est relié au thorax par le pédoncule, plus couramment appelé pétiole. Il s’agit en fait du premier segment de l’abdomen. Parfois, chez les espèces de la sous-famille des Myrmecinae, le pétiole est accompagné du post-pétiole, le deuxième segment de l’abdomen. Le post-pétiole est donc une des caractéristiques qui entrent en jeu dans l’identification et la classification des différentes espèces de fourmis.
L’abdomen
Dans la littérature scientifique, l’abdomen, ou gastre, porte aussi le nom de metasoma. L’abdomen abrite les systèmes digestif, respiratoire et circulatoire ainsi que les organes génitaux. Chez les reines, il est beaucoup plus grand car il possède une spermathèque, c’est à dire une réserve où est stocké le sperme des mâles avec qui elles se seront accouplées, et qui leur permettra de pondre des neufs pendant toute leur vie.
L’anatomie interne
La chaîne nerveuse et le cerveau
La chaîne nerveuse des fourmis est l’équivalent de notre moelle épinière. Elle est composée de trois ganglions thoraciques qui prennent chacun en charge une paire de pattes, ainsi que de ganglions abdominaux. Elle est située du côté ventral du corps, sous le tube digestif. C’est une caractéristique des invertébrés, au contraire des vertébrés chez qui la moelle épinière (équivalent de la chaîne nerveuse) est en position dorsale.
Dans la tête, trois ganglions fusionnés forment un cerveau, situé au-dessus du tube digestif. C’est là qu’arrivent des nerfs en provenance quasi exclusive des yeux et des antennes (lesquelles, rappelons-le, cumulent les sens de l’odorat, du goût et du toucher). Les fourmis possèdent également un système nerveux sympathique, en relation avec des organes sécrétant des hormones. Celles-ci jouent un rôle très important dans la vie des insectes, en intervenant dans des événements comme le développement, la métamorphose ou la reproduction.
Les systèmes respiratoire et circulatoire
Le système respiratoire des fourmis est formé d’un réseau de tubes, les trachées, qui débouchent sur l’extérieur du corps par des ouvertures situées sur le thorax ou l’abdomen appelées stigmates. Les trachées se ramifient en tubes de plus en plus fins, les trachéoles, qui conduisent l’air dans tous les organes. C’est à ce niveau que l’oxygène de l’air diffuse dans le sang, et que le gaz carbonique est rejeté dans l’air.
Les fourmis ne possèdent pas de sang à proprement parler, mais de l’hémolymphe. Ce liquide est constitué essentiellement de globules blancs. Comme la plupart des invertébrés, les fourmis ont un système circulatoire ouvert, ce qui signifie que les organes baignent en permanence dans l’hémolymphe qui circule librement dans tout le corps. Il n’y a ni veines ni capillaires, et les artères sont très réduites. Le cœur se présente sous la forme d’un long cylindre placé le long du corps sous le tégument du dos.
Le système digestif et le jabot social
Le tube digestif des insectes est divisé en trois parties : l’intestin antérieur, l’intestin moyen et l’intestin postérieur. L’intestin antérieur possède souvent un réservoir ou jabot, qui sert au stockage des aliments venus de la bouche. Des glandes salivaires débouchent dans l’intestin antérieur et leurs sécrétions sont mélangées aux aliments.
La digestion a lieu dans l’intestin moyen. C’est là, principalement, que les aliments sont absorbés. Les déchets provenant des aliments qui n’ont pas été digérés traversent l’intestin postérieur et sont éliminés. À la limite entre l’intestin moyen et l’intestin postérieur débouchent des sortes de reins primitifs, les tubes de Malpighi. Au niveau de la partie antérieure du tube digestif, la fourmi présente ce que l’on appelle un jabot social, ou estomac social. Il s’agit d’une division de l’estomac où est stockée de la nourriture prédigérée. C’est cette nourriture sous forme liquide qui sera distribuée aux autres ouvrières qui n’ont pas le temps de se nourrir, ainsi qu’aux larves ou à la reine qui ne peuvent pas se déplacer, par un procédé appelé trophallaxie. Le gésier sert d’estomac pour les propres besoins de la fourmi mais également de pompe pour propulser vers la bouche les aliments contenus dans le jabot social à destination des autres fourmis.
LA TROPHALLAXIE
Pour se nourrir et renforcer la cohésion sociale au sein de la colonie, les fourmis pratiquent la trophallaxie. La trophallaxie est l’échange de nourriture liquide régurgitée, nourriture qui est stockée à cet effet dans une partie de l’estomac appelée jabot social, ou estomac social. Les échanges trophallactiques interviennent entre les ouvrières et les individus non autonomes, par exemple la reine et les larves. On dit alors qu’il y a deux types d’individus : les solliciteurs et les sollicités.
L’échange est déclenché par une série de stimulations des antennes et des parties buccales. Ce transfert ne concerne pas exclusivement les aliments mais permet également de faire circuler des informations dans la colonie via des messages chimiques (phéromones). En effet, la trophallaxie permet aussi la distribution des sécrétions individuelles provenant par exemple des glandes labiales.
Les glandes
Les fourmis sont de véritables usines chimiques, puisqu’elles possèdent de nombreuses glandes au rôle prépondérant : la glande métapleurale, la glande prépharyngienne, la glande postpharyngienne, les glandes mandibulaires, la glande labiale, la glande pygidiale, la glande tergale, la glande de Dufour et la glande à poison.
Aussi appelée glande métasternale ou métathoracique, la glande métapleurale produit et sécrète divers composés dont des acides phénylacétiques et des antibiotiques sur l’exosquelette qui permettent d’éviter la prolifération de bactéries, de spores de champignons et de pollen sur la fourmi mais également dans le nid. Il faut toutefois noter que certaines espèces arboricoles ne possèdent pas de glande métapleurale.
La glande prépharyngienne et la glande labiale produisent toutes les deux des enzymes digestives.
Pour la fabrication et le stockage de lipides destinés à l’élevage des larves, c’est la glande postphryngienne qui entre en jeu. Par ailleurs, elle produit et sécrète des hydrocarbures cuticulaires. Ces liquides qui, comme leur nom l’indique, se retrouvent sur la cuticule, ont un rôle très important chez les insectes : ils préviennent la dissécation du ligament, l’invasion de micro-organismes ou de toxines. Chez les fourmis, ces constituants jouent en plus un rôle déterminant dans la reconnaissance coloniale.